Les produits dont on parle


A plusieurs reprises, différents noms de produits sont apparus dans les média. D’autres, bien
que n’ayant pas eu les honneurs de la Presse, préoccupent cependant les spécialistes de la lutte
contre le dopage.


Accroître l’efficacité du transport de l’oxygène par le sang
Trois voies sont ouvertes pour atteindre cet objectif :
• Augmenter la production de globules rouges par la moelle osseuse c. à d.
l’érythropoïèse, en évitant les inconvénients de l’EPO (1/2 vie brève, nécessité
d’injections répétées, risque actuel d’être contrôlé positif grâce à la nouvelle méthode
de détection dans les urines mise au point par les chercheurs français …) ;
• Elever la concentration du transporteur d’oxygène dans le sang ;
• Favoriser la captation de l’oxygène par les tissus en réduisant l’affinité de
l’hémoglobine pour celui-ci.


Augmentation de l’érythropoïèse
Les séjours en altitudes
De tels séjours permettent une augmentation naturelle transitoire de l’érythropoïétine et par
là-même, une augmentation de l’érythropoïèse.
Les érythropoïétines humaines recombinantes (rHu-Epo)
Il s’agit de produits fabriqués par des cultures de cellules de mammifères dans lesquelles a été
implanté par génie génétique le gène humain de l’érythropoïétine.
On distingue la rHu-Epo α (Eprex), la rHu-Epo β (Néorecormon) utilisées dans l’anémie
associée à l’insuffisance rénale chronique depuis 1986 et 1990. La rHu-Epo ω n’est pas
commercialisée en France.


Aranesp ou NESP (darbépoïétine) :
Cette protéine possède une structure quasi-identique à celle de l’Erythropoïétine (165 acides
aminés) excepté le fait qu’elle contient non pas trois - comme l’EPO - mais cinq sites de
glycosylation auxquels sont liées cinq chaînes glucidiques ramifiées. Son poids moléculaire
est plus élevé que celui de l’EPO (37 100 Da versus 30 400 Da) et sa demi vie environ trois
fois plus longue.
Une seule injection par semaine d’Aranesp est suffisante pour que son action sur la
stimulation de l’érythropoïèse se révèle efficace.
Sa faible concentration dans l’urine risquait de rendre difficile sa détection, mais, au grand
dam des tricheurs, sa structure est bien identifiable par rapport à celle de l’EPO naturelle.
Erythropoïétine δ (DynepoTM,Epoietin Delta, GA-EPO, Gene Activated Erythropoietin)
Non encore commercialisée pour des raisons de divergences juridiques entre deux laboratoires
(français et américain), cette protéine est produite par des cultures de cellules humaines grâce
à l’activation et à la régulation de leur gène EPO normalement quiescent. D’autres
laboratoires étrangers utiliseraient le même procédé et auraient déjà mis cette molécule sur le
marché.
Il n’est pas certain que cette molécule soit identique à 100% à la molécule humaine, naturelle,
d’origine endogène. Si cela était le cas, elle serait donc accessible à la détection.
« Adieu la seringue, vive les implants »
Les chercheurs ont développé des implants contenant un à deux millions de cellules humaines
issues d’une lignée qu’une modification génétique a rendues immortelles. Ces cellules sont
ainsi capables de se diviser indéfiniment, sans pour autant – d’après les auteurs - être
tumorigènes. Les scientifiques les ont dotées d’un gène codant pour l’EPO humaine et aussi
d’un gène de sécurité qui assurerait leur destruction au cas où elle s’échapperaient de la
capsule qui les isole de l’organisme du patient.
(Communiqué du Schweizerischer Nationalfonds zur Förderung des Wissenschaftlichen Forschung).
EPO mimetic


Le laboratoire Affymax a créé un peptide qui mime l’activité de l’érythropoïétine en étant
capable d’interagir directement avec les récepteurs de cette hormone au niveau des
précurseurs des globules rouges, stimulant ainsi leur formation avec une efficacité identique à
celle des Rhu-EPO et/ou de l’Aranesp.
Cette action a été démontrée in vitro sur des cellules humaines, précurseurs de la synthèse
globulaire et in vivo chez des modèles animaux.


Augmentation du transporteur de l’oxygène
Autotransfusion :
Cette méthode, très utilisée durant les années quatre vingt, consistait à prélever du sang chez
le sportif, à le conserver, puis à lui réinjecter ultérieurement, lorsque sa masse globulaire était
restaurée, afin d’augmenter encore plus celle-ci.
L’arrivée sur le « marché du dopage » de l’EPO, semblait avoir mis fin à cette pratique mais
la possibilité de la détecter a inciter les dopeurs à faire appel à de nouvelles méthodes
notamment celle dite de la « transfusion autologue assistée par l’utilisation de r-HuEpo »
(r-HuEpo enhanced autologous transfusion ou EEAT).
« L’implant remplace la seringue : des chercheurs lausannois
ont développé une capsule grande comme une pièce d’un
sou, remplie de cellules vivantes qui secrètent de l’EPO en
continu et qui n’est pas rejetée par le corps humain. »
Cette technique consiste à administrer de r-HuEpo, deux à trois fois par semaine pendant trois
semaines au cours desquelles sont pratiqués des prélèvements de sang qui sont stockés. Ainsi
peut-on disposer rapidement de sang autologue sans affecter les capacités d’entraînement.
Mieux … certains sportifs auraient leur propres donneurs compatibles dont il achèteraient le
sang régulièrement. Ceux-ci recevrait de l’EPO afin de pouvoir répondre à la demande !


Les solutions d’hémoglobine :
Si l’on souhaite utiliser en perfusion de telles solutions, la structure de l’hémoglobine doit être
modifiée car la toxicité rénale de cette substance, liée aux produits de son métabolisme, est
bien connue lorsqu’elle est hors des globules rouges.
- Trois types de formes chimiques modifiées de l’hémoglobine humaine ou animale ont été
expérimentés afin de pallier à ces inconvénients :
• Les hémoglobines réticulées : établissement de liaisons intra-moléculaires entre les
différentes sous-unités de Hb : DCLBH (Hb humaine), HEMASSIST (Hb humaine).
• Les hémoglobines polymérisées : établissement de liaisons inter-moléculaires :
POLYHEME (Hb humaine), HEMOLINK, HEMOPURE (Hb bovine).
• Les hémoglobines conjuguées : établissement de liaisons avec des macro-molécules :
PEG (Hb bovine), PHP (Hb. humaine).
Actuellement sont disponibles sur le marché international : l’HEMOPURE (Afrique du
Sud) ainsi que l’OXYGLOBINE, produit à usage vétérinaire qui a reçu l’agrément de la
FDA (Foods and Drugs Administration) et qui est vendu aux USA et en Europe.
La détection dans le sang, mais pas dans les urines, de ces solutions d’hémoglobine est
relativement aisée.
- Une autre démarche, actuellement en cours d’expérimentation, serait d’encapsuler
l’hémoglobine dans une enveloppe membranaire artificielle.


Les Per-Fluoro-Carbures (PFCs) :
Il s’agit de composés organiques dans lesquels, les atomes d’hydrogène sont remplacés par
des atomes de Fluor. Ce sont de puissants solvants des gaz qui ont la propriété d’augmenter la
quantité d’oxygène et de gaz carbonique dissout dans le plasma et donc immédiatement
disponible pour les tissus. Ainsi, les PFC constituent-ils des transporteurs efficaces d’oxygène
depuis les poumons vers les cellules, et à l’inverse de gaz carbonique des cellules aux
poumons. En outre, grâce à leur petite taille (environ 50 fois inférieure à celle des hématies)
les microgouttes de PFS en suspension dans le plasma peuvent atteindre des zones tissulaires
inaccessibles aux globules rouges.
Les émulsions de PFCs sont utilisées comme substituts sanguins, notamment en chirurgie
cardio-vasculaire : rinçage et amorçage des circuits de circulation extra-corporelle,
conservation d’organes destinés à la transplantation …
Les produits impliqués ne sont pas retrouvés dans l’urine mais peuvent être détectés dans l’air
expiré grâce à des analyses par CG-SM (chromatographie gazeuse - ²spectrométrie de masse).
Plusieurs pays ont déjà synthétisé de tels composés : la Russie (Perftoran), le Japon (Fluosol)
et plus récemment, les USA (Oxygent ; Oxyfluor).
La toxicité des PFCs n’est pas négligeables et leur usage présentent des dangers certains
lorsqu’ils sont utilisés en dehors d’un milieu médicalisé. Ainsi, dans les deux dernières années
deux accidents graves dont un mortel ont été répertorié dans le sport et attribués aux PFCs.
Un nouveau produit (Oxycyte T) a été récemment développé. D’après ses producteurs
(SYBD) cette substance ne présenterait pas d’effets indésirables.


Modification de l’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène
RSR-13 (EFAPROXIRAL)
Il s’agit d’un inhibiteur allostérique qui déplace la courbe de saturation de l’hémoglobine
(courbe de Barcroft) vers la droite ; c. à d. oriente l’équilibre allostérique de la réaction :
{hémoglobine réduite ⇔ oxyhémoglobine}, vers le premier terme.
RSR13 favorise ainsi la libération de l’oxygène au niveau des tissus consommateurs.
Dans le sport, l’usage de ce produit aurait pour objectif d’accroître la quantité d’oxygène
affectivement disponible au niveau des muscles en activité.
Eliminé dans les urines, sa détection peut être effectuée par HPLC-MS ou GC-MS
Les médicaments Psycho-actifs
Le SNUS
SNUS ou SNAFF: tabac moulu finement qui se glisse entre les gencives et les lèvres
et qui se consomme sous forme de tabac à chiquer. Souvent additionné
d’ammoniaque pour que le SNUS reste humide; parfois enrichi de fins éclats de
verre pour permettre à la nicotine de pénétrer plus rapidement dans le sang
(version hardcore).
Produit et commercialisé par l’industrie du tabac en Suède, ce produit est arrivé en Suisse il y
a une bonne dizaine d’années, importé par des sportifs et des entraîneurs scandinaves (suédois
surtout); ces derniers font, aujourd’hui encore, office de courriers, mais le snus peut
désormais également s’obtenir via Internet.
Le SNUS se chique; est comprimé entre la gencive et la lèvre inférieure ou supérieure ou
placé directement dans la cavité buccale; parfois emballé en petits sachets (facilitant
la consommation = version noble).
Lorsqu’il a fait son apparition en Suisse, le SNUS était consommé par des sportifs
suédois ; avec le temps, il est devenu relativement populaire auprès des sportifs
d’élite qui pratiquent des disciplines d’origine nordique: hockey sur glace, tennis,
tennis de table, ski (télémark, ski de fond), golf, course d’orientation. Il est
également consommé pendant l’activité sportive (à l’entraînement et même
pendant les compétitions). La consommation de SNUS est un rituel masculin qui a
un effet indésirable sur les plus jeunes, dans le sens où ils tendent à imiter le
comportement de leurs aînés.
La nicotine pénètre rapidement dans le sang. Elle agit différemment selon les
individus; elle stimule ("kick") et calme (subjectif) en même temps.
Attaque les gencives (paradontose), la muqueuse de la gorge et du larynx; génère
des carcinomes dans la cavité buccale et éventuellement sur les lèvres. A un léger
effet désinfectant (protège des caries), mais colore de façon inesthétique les dents
et les gencives; provoque des problèmes d’estomac. On ne sait pas encore grand chose
sur ses effets en combinaison avec l’alcool.
Une personne qui prend pour la première fois du SNUS aura, en quelques minutes,
la tête qui tourne et se sentira mal (surtout si elle ne fume pas). Le SNUS est une
bombe à nicotine, qui contient une concentration de tabac correspondant à
plusieurs cigarettes. L’accoutumance nécessite plusieurs prises et la dépendance
physique s’installe relativement rapidement; difficile d’arrêter (comme la cigarette).
Le SNUS est frappé d’une interdiction d’importation et de vente (ordonnance sur les
denrées alimentaires), mais sa consommation est autorisée !
La nicotine ne figure pas sur la liste des produits dopants !!


Modafinil
Commercialisé sous le nom de Modiodal, le modafinil exerce un effet éveillant central (non
amphétaminique) en élevant le niveau de vigilance et par là même, augmenterait l’activité
motrice.
La demi-vie d’élimination du modafinil est longue (10-12h).
modafinil
Comme médicament il est utilisé dans la Narcolepsie avec ou sans cataplexie. La première
prescription doit être réservée aux spécialistes hospitaliers (services de neurologie ou centres
du sommeil). Un bilan clinique spécialisé est nécessaire une fois l’an.
Il est a noter que, malgré ces conditions très strictes qui réglementent sa prescription, à peine
plus de moitié des ventes font l’objet d’une demande de remboursement par de la sécurité
sociale.
Le modafinil est inscrit sur la liste 2004 des produits dopants car cette substance a été détectée
dans les urines de plusieurs athlètes, notamment lors des derniers championnats du monde
d’athlétisme à Paris.


THG (tetrahydrogestrinone) : un nouveau venu
Il s’agit d’un stéroïde de synthèse, fabriqué par un petit laboratoire américain : le Bay Area
Laboratory Co-Operative (BALCO), ayant son siège à Burlingame, en Californie, dirigé par
Victor Conte.
Ses propriétés anabolisantes n’ont pas été formellement prouvées, même si elles sont
vraisemblables, car ce produit n’a subi aucune des investigations scientifiques nécessaires
pour toute nouvelle molécule destinée à être utilisée chez l’humain.
Cette molécule pose plusieurs problèmes préoccupants :
• Alors que jusque là, les substances dopantes étaient des médicaments détournés de
leur fonction thérapeutique, dans le cas de la THG, il s’agit d’un produit
spécifiquement mis au point pour le dopage sportif.
• Ce produit n’a pas été soumis à l’ensemble des tests scientifiques qui obligatoirement
précèdent l’autorisation de mise sur le marché (AMM) des médicaments, définissant
ainsi leurs conditions d’utilisation et par suite, assurant leur innocuité.
• Les petites modifications apportées au noyau stéroïdien permettant d’obtenir la THG
ont eu pour conséquence de rendre ce produit inaperçu aux contrôles urinaires antidopage
car on ne trouve que ce qu’on cherche. Dès que l’existence de cette substance
a été révélée la méthode de détection a été très rapidement mise au point par les
laboratoires spécialisés dans la détection du dopage.
THG (tétrahydrogestrinone)